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[[File:MSL3.png|left|thumb|Le projet développé par M. Schütte-Lihotzky, P. Forestier et T. Weiner, Plan de situation, rez-de-chaussée (1938)]]À Paris, Wilhelm Schütte et Margarete Schütte-Lihotzky peuvent poursuivre leur activité professionnelle, notamment autour du design d’écoles, d’espaces et de mobiliers destinés aux enfants. Wilhelm participe à un projet de construction d’école à Bayeux avec l’architecte hygiéniste Pierre Forestier<ref>https://archiwebture.citedelarchitecture.fr/archive/fonds/FRAPN02_FORPI</ref>, tandis que Margarete travaille en collaboration elle aussi avec Pierre Forestier, ainsi qu’avec l’architecte hongrois Tibor Weiner<ref>https://d-nb.info/gnd/12444220X</ref> à la conception d’un jardin d’enfants et d’une école maternelle pour jeunes filles. Margarete Schütte-Lihotzky connaît déjà Weiner, ancien élève du ''Bauhaus'' à Dessau, qu’elle a rencontré durant ses années moscovites. | [[File:MSL3.png|left|thumb|Le projet développé par M. Schütte-Lihotzky, P. Forestier et T. Weiner, Plan de situation, rez-de-chaussée (1938)]]À Paris, Wilhelm Schütte et Margarete Schütte-Lihotzky peuvent poursuivre leur activité professionnelle, notamment autour du design d’écoles, d’espaces et de mobiliers destinés aux enfants. Wilhelm participe à un projet de construction d’école à Bayeux avec l’architecte hygiéniste Pierre Forestier<ref>https://archiwebture.citedelarchitecture.fr/archive/fonds/FRAPN02_FORPI</ref>, tandis que Margarete travaille en collaboration elle aussi avec Pierre Forestier, ainsi qu’avec l’architecte hongrois Tibor Weiner<ref>https://d-nb.info/gnd/12444220X</ref> à la conception d’un jardin d’enfants et d’une école maternelle pour jeunes filles. Margarete Schütte-Lihotzky connaît déjà Weiner, ancien élève du ''Bauhaus'' à Dessau, qu’elle a rencontré durant ses années moscovites. | ||
Version du 7 novembre 2024 à 07:35

Margarete Schütte-Lihotzky (*23 janvier 1897 à Vienne, † 18 janvier 2000 à Vienne) est une pionnière de l’architecture autrichienne, dont le travail sur les logements sociaux, les espaces domestiques et les bâtiments pour la jeunesse – jardins d’enfants, crèches, écoles primaires – a révolutionné le design et l’architecture contemporaine. Célèbre pour la Cuisine de Francfort – dont le Centre Pompidou possède un exemplaire –, elle est membre du CIAM et est également très engagée dans l’idéologie communiste, ce qui l’amène à fréquenter de nombreux architectes et artistes français. Entre 1937 et 1938, Margarete Schütte-Lihotzky séjourne à Paris avec son époux, l’architecte Wilhelm Schütte[1], après avoir quitté Moscou et avant de gagner Istanbul. Durant ces mois à Paris, elle continue de travailler sur l’architecture et le design des meubles et espaces destinés aux enfants, mais surtout, elle prend ses premiers contacts avec la résistance communiste, mouvement au sein duquel elle s’implique totalement après avoir quitté la France en 1938. Elle demeure une figure importante de l’architecture postmoderne, représentant l’Autriche au sein du CIAM et d’autres organisations internationales.
Biographie
Née dans une famille de la petite bourgeoisie viennoise, Margarete Schütte-Lihotzky est l’une des premières femmes à étudier à la Kunstgewerbeschule, où elle suit les cours d’Oskar Strnad[2] et de Heinrich Tessenow[3]. Elle gagne plusieurs prix dès le début de sa carrière, dont le prix Max Mauthner en 1917 et en 1919 le prix Lobmeyr. À la fin de ses études, Schütte-Lihotzky voyage à Rotterdam où elle travaille auprès du bureau Melchior et D. A. Vermeer. Elle rejoint à partir de 1921 le bureau d’étude de l’architecte Adolf Loos, qui lui fait découvrir le travail de Le Corbusier. Elle participe à des projets de conception de foyers pour invalides et de logements sociaux d’abord à Vienne, puis dès 1926 à Francfort au sein du bureau d’Ernst May[4]. C’est à Francfort qu’elle développe un modèle de cuisine, la Cuisine de Francfort, qui rend son travail célèbre à l’international. Elle réalise à cette époque des plans de cuisine et d’aménagements intérieurs pour le ministre français du Travail et de la Prévoyance sociale, Louis Loucher[5], alors en visite à Francfort. En 1930, elle suit un groupe d’architectes, mené par Ernst May, vers l’Union soviétique, où elle travaille à de très nombreux projets d’écoles maternelles, de jardins d’enfants et autres espaces domestiques pour le gouvernement soviétique jusqu’en 1937. Elle voyage également durant cette période au Japon et en Chine.
En août 1937, les passeports allemands des époux Schütte-Lihotzky expirent ; ne pouvant pas rentrer en Allemagne, Margarete Schütte-Lihotzky décide de quitter l’Union soviétique avec son mari, William Schütte, pour rejoindre l’Europe occidentale grâce à l’aide d’Ernst Fischer[6], alors correspondant autrichien pour le Komintern, qui leur fournit des contacts à Londres et à Paris. Accompagnés de la famille de l’architecte suisse Hans Schmidt[7], ils gagnent d’abord Odessa, puis Istanbul où ils rendent visite à Bruno Taut[8] et son épouse Erika. Si Taut les invite à le rejoindre à l’Académie des beaux-arts d’Istanbul, Wilhelm et Margarete Schütte-Lihotzky quittent finalement la Turquie et voyagent en passant par Athènes, puis Trieste jusqu’à Paris.



À Paris, Wilhelm Schütte et Margarete Schütte-Lihotzky peuvent poursuivre leur activité professionnelle, notamment autour du design d’écoles, d’espaces et de mobiliers destinés aux enfants. Wilhelm participe à un projet de construction d’école à Bayeux avec l’architecte hygiéniste Pierre Forestier[9], tandis que Margarete travaille en collaboration elle aussi avec Pierre Forestier, ainsi qu’avec l’architecte hongrois Tibor Weiner[10] à la conception d’un jardin d’enfants et d’une école maternelle pour jeunes filles. Margarete Schütte-Lihotzky connaît déjà Weiner, ancien élève du Bauhaus à Dessau, qu’elle a rencontré durant ses années moscovites.
Dans le projet sur lequel travaillent Forestier, Weiner et Schütte-Lihotzky, l’influence de cette dernière quant à l’agencement des espaces est indéniable, forte de son expertise sur le design d’espaces destinés à la petite enfance. Pierre Forestier est très engagé dans le développement au sein des métropoles de solutions pour lutter contre la tuberculose, il a notamment conçu des cités-sanatorium, c’est d’ailleurs probablement sur sa recommandation que Schütte-Lihotzky se voit confier la réalisation d’une étude préliminaire à la construction de préventoriums pour enfants (Kinderpräventorien) par le ministère de la Santé publique[11].
Au regard de ce travail collaboratif entre trois architectes sensibles aux idées communistes, il est certain que les Schütte-Lihotzky ont fréquenté par ce biais le milieu artistique communiste engagé, notamment André Lurçat[12], qu’ils ont déjà rencontré à Moscou. Ayant déjà émis le souhait, durant ses années moscovites, de s’engager dans la résistance antifasciste, Margarete Schütte-Lihotzky vit depuis Paris l’annexion de l’Autriche par l’Allemagne nazie, ce qui la motive d’autant plus à s’engager dans la résistance. Ernst Fischer lui fournit une première liste de noms et d’adresses grâce à laquelle elle peut prendre contact afin de rejoindre le parti communiste autrichien (KPÖ). Si les contacts avec les architectes français de la modernité ont influencé son travail, l’architecte puise aussi dans les préceptes développés par Jean-Jacques Rousseau dans Émile ou de l’Éducation (1762) pour envisager son approche du design d’espaces pour la petite enfance[13]. Elle cite également Balzac dans ses mémoires, ainsi que la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d’Olympe de Gouges[14] – cependant, elle la date de 1871 et l’attribue à tort à la Commune de Paris.
Le séjour parisien des Schütte-Lihotzky n’a jamais eu vocation à durer, ils ne restent en tout et pour tout que huit mois dans la capitale française. Dans ses mémoires, Margarete Schütte-Lihotzky explique qu’il était « sans espoir de vouloir se construire une carrière professionnelle à Paris » [Es war hoffnungslos, sich in Paris eine berufliche Existenz aufbauen zu wollen.], tant la ville croulait sous les réfugiés[15]. Les époux Schütte-Lihotzky quittent d’abord Paris en avril 1938 pour Londres, dans l’espoir – vain – d’y trouver du travail, avant d’accepter, en juin 1938, la proposition de leur ami Bruno Taut de rejoindre l’Académie des beaux-arts d’Istanbul. Margarete obtient un contrat de trois ans avec le ministère de l’Éducation turque, dans l’optique de développer des écoles. Elle rencontre à Istanbul un autre architecte autrichien, ayant séjourné à Paris quelques années auparavant, Herbert Eichholzer, qui assume la responsabilité de la branche du KPÖ en Turquie. Le 22 janvier 1941, elle est arrêtée par la Gestapo au Café Victoria am Schottentor à Vienne, alors qu’elle mène une mission pour la résistance communiste, puis elle est condamnée à quinze ans de prison et incarcérée en Bavière.
Après la guerre, Margarete Schütte-Lihotzky reprend ses activités au sein de la section autrichienne du CIAM[16] (Congrès Internationaux d’Architecture Moderne). Ayant déjà pris part dans les années 1920 aux premiers congrès, où elle fait notamment la connaissance de Le Corbusier en 1929, elle participe au congrès de Bridgewater (1947), où elle est la seule représentante autrichienne, puis de Bergame (1949). Elle travaille à Vienne, ainsi qu’en République démocratique allemande (RDA), tout en poursuivant son engagement politique jusqu’à son décès en 2000, à l’âge de 103 ans.
Margarete Schütte-Lihotzky apparaît à plusieurs reprises dans la revue Austriaca. En 1981, elle contribue au numéro 12, consacré à l’architecture autrichienne, où elle revient sur sa pratique d’agencement des espaces du travail domestique dans les logements qu’elle a conçus à Vienne et à Francfort. La publication de ses mémoires en 1985 et la parution d’un ouvrage collectif retraçant sa carrière en 1993 font aussi l’objet de comptes rendus dans la revue, rédigés par Herbert Steiner. Enfin, Felix Kreissler lui consacre un article d’hommage pour son centenaire en 1997, dans le numéro 44.
Références et liens externes
- ↑ https://www.geschichtewiki.wien.gv.at/Wilhelm_Schütte
- ↑ https://www.geschichtewiki.wien.gv.at/Oskar_Strnad
- ↑ https://www.biographien.ac.at/oebl/oebl_T/Tessenow_Heinrich_1876_1950.xml
- ↑ https://frankfurter-personenlexikon.de/node/462
- ↑ https://www2.assemblee-nationale.fr/sycomore/fiche/%28num_dept%29/4823
- ↑ https://www.geschichtewiki.wien.gv.at/Ernst_Fischer
- ↑ https://fra.archinform.net/arch/1692.htm
- ↑ https://www.adk.de/de/akademie/mitglieder/?we_objectID=53527
- ↑ https://archiwebture.citedelarchitecture.fr/archive/fonds/FRAPN02_FORPI
- ↑ https://d-nb.info/gnd/12444220X
- ↑ Baumgartner-Haindl 1996, 170
- ↑ https://archiwebture.citedelarchitecture.fr/archive/fonds/FRAPN02_LURAN
- ↑ Engelmann in Bois & Reinhold 2019, 286-297
- ↑ https://www.dictionnaire-creatrices.com/fiche-olympe-gouges
- ↑ Schütte-Lihotzky 1985, 48
- ↑ https://www.universalis.fr/index/ciam-congres-internationaux-d-architecture-moderne
Bibliographie
Littérature primaire
- Schütte-Lihotzky, Margarete : Erinnerungen aus dem Widerstand: das kämpferische Leben einer Architektin von 1938-1945. Verlag Volk und Welt. Berlin : Promedia 1985.
- Schütte-Lihotzky, Margarete : Warum ich Architektin wurde, édité par Karin Zogmayer, Salzbourg : Residenz 2004.
- Schütte-Lihotzky, Margarete : « Vienne-Francfort : construction de logements et rationalisation des travaux domestiques ». In : Austriaca no12 (1981), p. 129–138. URL : https://www.persee.fr/doc/austr_0396-4590_1981_num_12_1_4108
Littérature secondaire
- Baumgartner-Haindl, Susanne : « Projekte Frankreich 1937-1938 ». In: Peter Noever (éd.) : Margarete Schütte-Lihotzky: soziale Architektur Zeitzeugin eines Jahrhunderts, 2nde édition. Vienne : Böhlau 1996, p. 169–172.
- Bois, Marcel ; Reinhold, Bernadette (éd.) : Margarete Schütte-Lihotzky: Architektur - Politik – Geschlecht. Bâle : Birkhäuser Edition Angewandte 2019.
- Kreissler, Felix : « Un centenaire pour une centenaire ». In : Austriaca no44 (1997), p. 143–145.
- Steiner, Herbert : „Margarete Schütte-Lihotzky, Erinnerungen – Aus dem Widerstand 1938-1945, Verlag Volk und Welt, Berlin 1985.“ In : Austriaca no21 (1985), p. 128. URL : https://www.persee.fr/doc/austr_0396-4590_1985_num_21_1_4176_t1_0128_0000_2
- Steiner, Herbert : „Peter Noever (éd.) : Margarete Schütte-Lihotzky – Zeitzeugin eines Jahrhunderts - Soziale Architektur, österreichisches Museum für angewandte Kunst, Wien 1993.“ In : Austriaca no38 (1994), p. 155. URL: https://www.persee.fr/doc/austr_0396-4590_1994_num_38_1_3088_t1_0165_0000_2
Auteur
Solène Scherer
Mise en ligne : 06/11/2024